Alors que l’Assemblée nationale a entamé l’examen du projet de loi rectificative de financement de la sécurité sociale, on ne peut être que frappé par l’impossibilité de faire entendre les attentes des personnes en situation de handicap et des aidants dans cette réforme des retraites envisagée par le gouvernement.
Pourtant, avec des taux de chômage et de pauvreté largement supérieurs à la moyenne nationale, une fatigabilité importante et des carrières en dents de scie, les personnes en situation de handicap sont fortement pénalisées à l’âge de la retraite.
Les personnes présentant des situations de handicap sévère ou de maladies chroniques invalidantes voient leur espérance de vie réduite pour nombre d’entre elles de plus de 10 ans. Les aidants – majoritairement des femmes – contraints de mettre leur carrière professionnelle entre parenthèses pour s’occuper de leur proche – faute d’autres solutions – sont également lésés.
Dès cet automne, le Collectif Handicaps avait fait part de ses propositions au gouvernement, afin que le projet de réforme améliore les conditions de départ à la retraite et le niveau de vie des personnes en situation de handicap, de celles ayant eu des conditions de travail pénibles et de toutes celles aux carrières hachées comme les aidants. Force est de constater que ces demandes sont restées lettres mortes. La consultation tant mise en avant par le gouvernement n’a donc pas eu lieu avec les associations.
Devant le refus du gouvernement d’ouvrir de véritables négociations et face à un projet de réforme qui va aggraver la précarisation de tous les travailleurs qui ne bénéficient pas de dispositifs dérogatoires, le Collectif Handicaps a adressé dès la communication définitive du projet de loi des propositions aux parlementaires, pour enrichir le texte.
Hélas, la majorité des amendements issus de ces revendications et déposés par les députés en commission des affaires sociales a été jugée irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, soit parce qu’ils créaient une charge financière pour l’État, soit parce qu’ils avaient un lien insuffisant avec les comptes de la Sécurité Sociale…
Passer par un PLFRSS pour une réforme aussi structurante est inadmissible : cela réduit le temps de débat des parlementaires et limite le droit d’amendements. Des irrecevabilités pour « cavalier législatif » ou « cavalier budgétaire » tombent par centaines, alors même que le texte en lui-même propose des mesures qui n’impactent pas directement les comptes sociaux…
Si même les parlementaires ne peuvent pas porter la voix des citoyens handicapés du fait de l’usage abusif de biais de procédure, le Collectif Handicaps s’inquiète pour la qualité du débat démocratique.
Les personnes en situation de handicap – qui rencontrent hélas souvent des difficultés à descendre manifester dans la rue – sont encore une fois invisibilisées, alors que cette réforme les concerne comme tout un chacun.
Les 52 associations nationales membres du Collectif Handicaps [1] ne peuvent se satisfaire de statu quo et de timides petits pas. Elles demandent une véritable réforme, dont la boussole devrait être d’aller vers plus de justice sociale, ce qui implique la réelle prise en compte des spécificités de l’emploi des travailleurs handicapés ou invalides (pénibilité, fatigabilité, chômage de longue durée, ressources faibles, etc.) et des aidants (temps partiels ou longs arrêts de travail, état de santé, etc.).
Le président de la République et son gouvernement doivent prendre en compte ce que les citoyens leur disent, sans plus attendre. Le Collectif Handicaps est force de propositions et se tient à leur disposition pour y travailler dans un état d’esprit de co-construction. Il n’est pas trop tard pour rendre ce projet de loi vraiment source de progrès social !