Arnaud de Broca, président du Collectif Handicaps qui réunit 49 associations, estime que « la qualité de l’accompagnement et la sécurité des personnes handicapées » se sont encore dégradées. « Il est temps d’avoir un débat de société sur l’investissement nécessaire pour les enfants et adultes en situation de handicap vivant en France », affirme-t-il.
À grand renfort de campagnes de communication, le gouvernement affirme que les personnes handicapées sont des personnes comme les autres. Une évidence qu’il ne respecte pourtant pas dans l’élaboration des politiques publiques de droit commun, comme le lui a rappelé en septembre le Comité des droits des personnes handicapées des Nations unies. La séquence du Ségur de la santé en est une parfaite illustration. Au moment même des premières annonces qui revalorisaient les professionnels soignants hormis ceux exerçant dans les lieux de vie des personnes handicapées (établissement et domicile), le mal était fait. De manière inéluctable, cela a dégradé la qualité de l’accompagnement et affaibli, encore plus, un secteur déjà miné par un réel manque d’attractivité.
Les recrutements sont devenus quasiment impossibles dans de nombreux métiers et les départs volontaires de personnels se multiplient. À certains endroits, la continuité des soins et la qualité des accompagnements ne sont plus garanties. Face à l’incapacité d’accueillir en toute sécurité des personnes lourdement handicapées, celles-ci doivent retourner chez des proches, alors même que le secteur de l’aide à domicile traverse une crise de grande ampleur qui délaisse des personnes et des familles isolées et démunies. Quand le mode dégradé devient la règle, la qualité de l’accompagnement et la sécurité des personnes ne sont plus assurées.
Pendant de longs mois, les associations ont relayé auprès du gouvernement les alertes qu’elles recevaient. La seule réponse que nous avons reçue pendant un an et demi, c’est le silence. Un silence assourdissant, méprisant. Et pendant ce temps, des droits fondamentaux ont été bafoués. Le gouvernement est sorti de son long silence le 8 novembre par le biais d’une intervention surprise du Premier ministre, non concertée. Que de temps perdu! Que de dégâts causés! Et ce n’est pas une conférence sur les métiers de l’accompagnement qui suffira.
Pire, en décidant de revaloriser tous les professionnels soignants, le gouvernement crée une nouvelle inégalité en renvoyant aux départements et aux partenaires sociaux le « soin » de négocier les revalorisations des autres salariés non soignants. Une logique de cloisonnement au détriment d’un accompagnement global de qualité. L’exemple parfait de décisions politiques qui morcellent la vie des personnes. Certes, le droit à l’accès aux soins est primordial, mais d’autres droits le sont tout autant (droit d’aller et venir, liberté de choix…).
En pleine campagne électorale, il est temps d’avoir un débat de société sur l’investissement nécessaire pour les enfants et adultes en situation de handicap vivant en France, qui ont des besoins d’accompagnement, même très complexe. Le silence des candidats ne serait qu’une preuve supplémentaire de leur désintérêt pour une partie non négligeable de la population. Le prochain président de la République aura à régler une situation qui reste explosive et une dégradation de la vie des personnes handicapées.