Paris, le 19 mars 2024. L’Assemblée Nationale vient d’adopter définitivement la « proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l’autonomie ». Loin d’être une grande loi en faveur de l’autonomie de toutes et tous, ce texte n’apporte que des bouts de solutions aux difficultés rencontrées par les personnes et les professionnels qui les accompagnent. Surtout, il insinue que la politique publique de l’autonomie se résume à l’accompagnement de la perte d’autonomie liée à l’âge. Le Collectif Handicaps regrette, une fois de plus, que les personnes en situation de handicap soient exclues du débat.
Malgré le changement du titre de cette proposition – passant du « bien vieillir » à des « mesures relatives au grand âge et à l’autonomie » – le Collectif Handicaps n’est pas dupe : cette proposition de loi reste centrée sur l’accompagnement des personnes âgées et aurait pu être largement plus audacieuse que quelques mesurettes qui ne répondront pas aux besoins des personnes et aux attentes du secteur.
Le Collectif Handicaps dénonce surtout la logique de segmentation entre politique du grand âge et politique du handicap, que cette proposition de loi ne fait qu’entériner.
Cette opposition systématique n’a pas lieu d’être. Déjà, parce qu’il n’y a aucune raison – si ce n’est de la discrimination – d’écarter des politiques du « bien vieillir » les personnes en situation de handicap : d’une part, car elles aussi vieillissent et doivent pouvoir le faire dans les meilleures conditions. D’autre part, car de nombreuses personnes, en avançant en âge, seront en situation de handicap (cognitif, sensoriel, physique ou psychique).
Mais, plus généralement, la politique de l’autonomie concerne, dans la définition de la 5e branche de la sécurité sociale dédiée à l’autonomie, toutes les personnes quels que soient leur âge, leur état de santé et leur handicap. Le soutien à l’autonomie ne tourne pas qu’autour de la perte d’autonomie, mais aussi et surtout autour du développement et du maintien de son autonomie tout au long de sa vie, et ce, dès le plus jeune âge
Ce texte aurait dû avoir l’ambition de bâtir une société où chacun et chacune, quel que soit son âge ou sa situation de handicap, peut vivre selon ses aspirations, ses besoins et ses choix et avoir droit à une compensation intégrale, personnalisée et effective, sans reste à charge. Toutes nos propositions allant dans ce sens n’ont pas été retenues par le Gouvernement et le Parlement.
Nous sommes d’autant plus inquiets de ce resserrement de la focale politique sur les personnes âgées, que cette proposition de loi dite « bien vieillir » entérine la création du service public départemental de l’autonomie (SPDA). Alors qu’il impactera directement le parcours d’accès aux droits des personnes en situation de handicap, le SPDA se construit essentiellement autour des professionnels et institutions liées aux personnes âgées, sans prise en compte des besoins des bénéficiaires en situation de handicap…
Nous ne cesserons de le répéter : aucune véritable politique de l’autonomie ne pourra être menée tant que persiste cette distinction entre handicap et vieillesse, que le droit à la compensation n’est pas effectif et que l’offre ne s’adapte pas au public.
Enfin, si la proposition de loi inscrit la mise en place d’une loi de programmation pluriannuelle par l’exécutif, le manque de lisibilité sur ce sujet depuis le remaniement de janvier dernier inquiète. Or, il est aujourd’hui urgent de pouvoir réfléchir ensemble et de mettre à débat, de manière concertée et transversale, les points fondamentaux que sont les financements et la gouvernance de la politique publique de l’autonomie.